Le monstre
09
sept.
2008
J'ai oublié l'amour sur le seuil de ma naissance, ne laissant dans mon coeur que la haine.
Déjà toute petite, encore accrochée à ma mère par mon cordon, je n'avais qu'une idée en tête, punir mes géniteurs de m'avoir mise au monde.
Qu'ils crêvent avec leurs rêves pour moi, me disais-je.
Ils puaient la misère, avec leurs minables petites volontés. Hélas pour moi, mes parents faisaient partie de la majorité qui, comme disait Einstein, ne regardent pas avec leurs propres yeux et qui n'éprouvent pas avec leurs propres sensibilités. Tout leur tombait directement dans le crâne depuis les mass-media. Je ne pouvais pas vivre dans ce remugle de la bêtise, ça me foutais trop les boules. Quoi qu'il en soit, j'ai tout fait pour qu'ils me lache le plus vite possible. A trois ans, j'ai réussi à empoisonner mon père avec des champignons qui poussaient dans le jardin. Trop facile. Quand je lui ai présenté mon joli plat cuisiné, avec mon beau sourire et mes grands yeux, ce con ne s'est pas douté une seconde que je souriais parce qu'il allait mourrir dans l'heure ! Il ne valait vraiment pas la peine que je me fatigue. Je crois qu'il a souffert. Tout le monde à conclut à l'accident domestique, au "pas de chance" qui arrive plus souvent qu'on ne le croit. En tout cas, personne ne m'a soupçonnée ne serait-ce qu'une seconde, car je n'étais forcément pas responsable à 3 ans. C'était bien parti, et je ne comptais pas m'arrêter en si bon chemin.
Pour ma mère, ça a été plus difficile. Elle s'accrochait à moi, une horreur. Quand elle me prenait dans ses bras, je pleurais et, évidemment, ça n'avait pour résultat que de la rendre encore plus dégoulinante de mièvrerie du genre, "ma pauvre petite puce, il y a quelque chose qui te fait souffrir dans ton ventre". Elle avait raison dans un sens. Ma souffrance, c'était ma haine envers cette sale bonne femme, avec ses idées préconçues sur tout, qui priait Dieu sans arrêt et était incapable de la moindre véritable compassion pour son prochain. Nietzsche a dit Le fourreau doré de la compassion cache parfois le poignard de l'envie. C'était bien vrai pour ma mère, jalouse de tout. En y réfléchissant avec le recul, elle était un peu comme moi, pleine de haine. Mais en lâche, incapable d'assumer ses propres pensées et se cachant continuellement derrière son "Dieu dit qu'il faut faire comme ci et comme ça, et que le diable est partout dans l'homme et nécessite une lutte permanente". Ma conviction, c'est que si dieu existe, c'est un bel enfoiré qui s'est amusé à tout créer, y compris le mal, notion toute relative s'il en est, et qu'il laisse mijoter tout ça sous son regard amusé en se demandant ce que ça va donner, parce que l'éternité c'est long, surtout vers la fin et qu'il faut bien rigoler un peu de temps en temps.
Donc, ma mère était prudente, et elle avait une façon de penser proche de la mienne. J'avais quand même un avantage, Il était absolument impossible pour elle que sa propre fille puisse avoir la moindre parcelle de méchanceté et elle n'avait aucune idée de la haine que je lui vouais. D'ailleur, c'est vrai, je n'étais pas méchante. Je passais pour une enfant sage, mais c'est parce que je passais beaucoup de temps à élaborer des plans pour mettre fin à ce que je considérais comme un cauchemar trop long. J'ai finalement réussi à me débarrasser d'elle. Je ne l'ai pas tuée, non. Je l'ai juste rendue folle. Avec un peu d'imagination, et quelques plantes on peut persuader sa mère d'entendre des voix. La paranoïa a fait le reste.
C'est quand on a plus quelque chose qu'on se rend compte qu'elle nous manque. En fait je n'avais pas été une enfant malheureuse avec mes parents. Ma famille d'accueil était encore pire. Il me fallait l'indépendance, au plus vite. Ca m'a donné la haine...
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